Qu’est-ce que la méthode SMART ?
La méthode SMART est un cadre conceptuel (un acronyme) largement utilisé pour formuler des objectifs efficaces, en s’assurant qu’ils soient clairs, pertinents et mesurables. Le mot SMART correspond aux cinq critères anglais : Specific, Measurable, Achievable, Relevant et Time-bound.
L’idée centrale est que tout objectif formulé suivant ces critères augmente les chances d’être compris, suivi, évalué et atteint. La méthode remonte à George T. Doran (1981), inspiré du management par objectifs développé par Drucker (1954). Au fil du temps, SMART est devenu un instrument de référence dans le management, la gestion de projet, le développement personnel ou le pilotage d’équipes.
Cependant, bien que très populaire, la méthode SMART n’est pas exempte de critiques : certains chercheurs soulignent son manque de base théorique robuste ou son application mécanique dans des contextes dynamiques. Dans certains domaines (par exemple créativité, innovation), des alternatives — ou des variantes du modèle SMART — peuvent parfois être plus pertinentes.
Les composantes de l’acronyme SMART (décomposition scientifique)
🔹S : Spécifique (Specific)
Un objectif « Spécifique » doit répondre avec précision aux questions : Qui ? Quoi ? Où ? Pourquoi ?. Il évite les formulations vagues ou génériques, en ciblant précisément l’enjeu à atteindre.
🔹M : Mesurable (Measurable)
Un objectif SMART doit être quantifiable ou du moins permettre une évaluation objective. Il faut définir des indicateurs clairs (KPI) pour suivre l’avancement.
🔹A : Atteignable / Acceptable (Achievable / Acceptable)
Le critère « A » impose que l’objectif soit réaliste en tenant compte des contraintes (ressources, compétences, contexte) et acceptable par les parties prenantes. Certains préfèrent traduire ce A par « Acceptable » pour insister sur l’adhésion collective.
🔹R : Pertinent / Réaliste (Relevant / Realistic)
« R » exige que l’objectif soit aligné avec les priorités stratégiques et ait du sens dans le contexte global. Il doit être pertinent pour les acteurs et compatible avec les autres objectifs.
🔹T : Temporel (Time-bound)
Enfin, tout objectif SMART doit comporter une borne temporelle : date de début, échéance, jalons intermédiaires. Cela évite que le projet traîne indéfiniment dans l’indétermination.
Pourquoi utiliser la méthode SMART ? Les bénéfices documentés
- Clarté et réduction des ambiguïtés
En forçant la précision, SMART aide à clarifier ce qui est attendu et évite les malentendus dans les équipes. - Pilotage et suivi facilité
La dimension mesurable permet de suivre les progrès et de réajuster les actions en cours de route. - Renforcement de l’engagement
Des objectifs réalistes et acceptés mobilisent davantage les parties prenantes. Le fait de rendre un objectif temporel et mesurable permet aussi de maintenir la motivation. - Alignement stratégique
Le critère de pertinence garantit que les objectifs SMART contribuent aux orientations globales, évitant les efforts dispersés.
Toutefois, des critiques importantes ont été formulées dans la littérature scientifique, notamment dans les domaines promotion de l’activité physique et créativité, montrant que l’adoption mécanique de SMART peut créer des effets pervers ou limiter la flexibilité.
Limites, critiques et contextes d’adaptation de la méthode SMART
Manque de fondement empirique et adaptation rigide
L’une des critiques majeures est que l’acronyme SMART n’est pas fondé sur une théorie unifiée : il est davantage une heuristique pratique qu’un modèle scientifique robuste. Bjerke et al. (2017) insistent sur le fait qu’appliquer simultanément tous les critères, indépendamment du contexte, peut être trompeur.
Rigidité en environnements incertains ou innovants
Dans des secteurs en mutation rapide ou des projets créatifs, imposer des cibles fixes peut freiner l’adaptation et l’expérimentation. L’analyse de MIT Sloan suggère que dans des environnements instables, la rigidité temporelle et spécifique de SMART peut nuire à la vision exploratoire. Une étude récente montre que des objectifs ouverts (do-your-best, open goals) peuvent parfois dépasser SMART dans des tâches créatives.
Objectifs multiples, conflits et priorisation
Quand plusieurs objectifs SMART sont définis simultanément, ils peuvent entrer en conflit pour les ressources (temps, budget). Le modèle SMART ne prescrit pas un mécanisme de hiérarchisation ou de coordination entre eux.
Formulation souvent imparfaite dans la pratique
Des analyses montrent que de nombreux objectifs dits « SMART » dans les organisations ne respectent pas effectivement tous les critères — certains manqueront de temporalité, d’indicateur mesurable ou de pertinence claire.
Conseil d’adaptation : on peut appliquer les critères séquentiellement (d’abord définir la spécificité, puis ajouter la mesurabilité, etc.) plutôt que de tenter de tout imposer simultanément. Cette approche est recommandée dans les contextes complexes.
Comment concevoir des objectifs SMART : démarche pratique
- Identifier le domaine d’application (projet, développement personnel, formation, santé, etc.).
- Formuler une première version de l’objectif, en version « grand public ».
- Vérifier et enrichir selon les critères SMART, un critère après l’autre : rendre l’objectif spécifique, ajouter un indicateur mesurable, tester sa faisabilité, vérifier sa pertinence, fixer une échéance.
- Choisir ou concevoir des indicateurs (KPI) adaptés pour le suivi.
- Décomposer si besoin en sous-objectifs SMART pour un meilleur pilotage.
- Planifier des points de revue intermédiaires (jalons) pour vérifier l’adéquation entre l’objectif et le contexte en cours.
- Adapter ou ajuster l’objectif si nécessaire en cours de réalisation, notamment en contexte dynamique.
Exemple d’objectif SMART (contexte QVCT– Qualité de Vie et Conditions de Travail) :
« D’ici décembre 2025, réduire de 25 % le taux d’absentéisme pour cause de stress (actuellement 8 % → 6 %) en instaurant une pause active hebdomadaire de 20 minutes et en proposant un accompagnement individuel aux salariés volontaires. »
Spécifique : cible le stress et l’absentéisme
Mesurable : réduction chiffrée de 25 %
Atteignable : objectif réalisable via des actions concrètes et ressources existantes
Pertinent : améliore la santé, la cohésion et la performance globale
Temporel : échéance fixée à décembre 2025
Variantes et extensions du modèle SMART
Au fil du temps, plusieurs déclinaisons et ajouts sont apparus pour pallier certaines limites :
- SMARTER (Evaluated, Reviewed / Engaging, Rewarding)
- Ajout de critères comme « Éthique », « Ecologique », « Engagé »
- Formules comme SMART-T, SMART + C pour « Compatible »
- Approche PURE / CLEAR pour les objectifs personnels ou créatifs
- Application de objectifs ouverts ou flexibles dans certains contextes (plutôt que de fixer des cibles rigides)
Ces extensions permettent de rendre SMART plus adapté aux réalités contemporaines, notamment en innovation, créativité ou domaines complexes.
Quand utiliser (et ne pas utiliser) la méthode SMART ?
Usages recommandés
- Projets structurés avec des ressources identifiées
- Processus de planification (management, formation, RH, pilotage)
- Objectifs d’amélioration de performance avec indicateurs mesurables
- Contextes prévisibles ou stables
Risques ou cas moins adaptés
- Domaines hautement innovants, créatifs ou incertains
- Situations nécessitant adaptation constante ou exploration
- Objectifs qualitatifs difficiles à quantifier
- Projets où les critères fixés a posteriori contraignent l’inventivité
Dans de tels cas, il est utile d’associer SMART à des méthodes plus souples (objectifs exploratoires, revue itérative, feedback qualitatif, etc.).
Conclusion
La méthode SMART demeure l’un des cadres les plus populaires pour formuler des objectifs opérationnels dans le monde du management, de la pédagogie, du développement personnel ou de la gestion de projet. Son intérêt réside dans sa capacité à structurer la pensée, clarifier les attentes et favoriser le pilotage. Toutefois, son application mécanique peut poser problème dans des environnements complexes ou créatifs. Il est donc indispensable de l’adapter, l’enrichir ou la compléter selon le contexte.
Même si SMART ne bénéficie pas d’un fondement théorique unique solide, son heuristique est puissante lorsqu’elle est utilisée avec esprit critique et souplesse. Il est pertinent, dans le glossaire Brain Ball, de l’indexer sous « méthode SMART » pour maximiser la lisibilité, tout en utilisant « SMART » abondamment dans le texte pour renforcer son référencement.
Pour aller plus loin :
- Bjerke, M. B., Renger, R., & Clemens, C. (2017). Why the “A” in SMART goals could be a “D”: The role of difficulty in goal setting theory. Evaluation and Program Planning, 60, 124-128. https://doi.org/10.1016/j.evalprogplan.2016.08.008
- Doran, G. T. (1981). There’s a S.M.A.R.T. way to write management’s goals and objectives. Management Review, 70(11), 35-36. Harvard Business Review / MIT Sloan Management Review. (2020). When SMART goals are not so smart. https://sloanreview.mit.edu/article/when-smart-goals-are-not-so-smart/
- Van Hooft, E. A. J., & de Jong, M. (2024). Open goals versus SMART goals: When less structure leads to better performance. Educational Psychology, 44(5), 623-639. https://doi.org/10.1080/01443410.2024.2420818
Williams, S. L., & French, D. P. (2021). What are the most effective goal-setting approaches for changing physical activity behaviour? A systematic review. Health Psychology Review, 15(4), 514-544. https://doi.org/10.1080/17437199.2021.2023608
FAQ sur la méthode SMART
Qu’est-ce qui différencie la méthode SMART d’un simple objectif classique ?
La méthode SMART impose que l’objectif soit Spécifique, Mesurable, Atteignable, Pertinent et Temporel. Cela structure la formulation de l’objectif, facilite le suivi et limite l’ambiguïté, ce qu’un objectif classique, souvent vague, ne garantit pas.
Peut-on appliquer la méthode SMART dans les domaines créatifs ou artistiques ?
Oui, mais avec prudence. Dans des contextes créatifs, des objectifs très rigides peuvent bloquer l’innovation. On recommande d’adopter des cibles plus ouvertes ou flexibles, ou d’utiliser des variantes (objectif libre, jalons qualitatifs) plutôt que d’appliquer SMART de façon mécanique.
Quelles sont les principales critiques de la méthode SMART ?
Les critiques portent sur son absence de fondement théorique unique, sa tendance à la rigidité dans des contextes incertains, et le fait que beaucoup d’« objectifs SMART » dans la pratique ne respectent pas tous les critères (Ogbeiwi, 2017).
Comment enrichir ou compléter SMART pour qu’elle reste pertinente aujourd’hui ?
On peut adopter des variantes comme SMARTER (ajout de critères Evaluated, Reviewed), introduire des notions d’éthique ou de durabilité, ou combiner SMART avec des méthodes agiles, des révisions périodiques ou des objectifs ouverts afin d’introduire de la flexibilité selon le contexte.