
© Sandrine Pellet
Musique et démence : une nouvelle étude renforce le lien
La relation entre musique et démence intrigue chercheurs et cliniciens depuis des années. La publication d’octobre 2025 dans l’International Journal of Geriatric Psychiatry apporte un signal supplémentaire : au sein d’une large cohorte de plus de 10 800 personnes âgées de 70 ans et plus, écouter souvent de la musique et/ou jouer d’un instrument est associé à un risque plus faible de démence. Il ne s’agit pas d’une preuve de causalité, mais d’un indice fort qui converge avec d’autres travaux : la musique – par son ancrage émotionnel, rythmique et social – pourrait accompagner un vieillissement cognitif plus serein.
Au-delà de l’effet « plaisir », la musique mobilise des fonctions essentielles : attention, mémoire, anticipation temporelle et coordination auditivo-motrice. Autant de leviers au cœur des approches qui articulent mouvement et rythme, comme la méthode Brain Ball.
Ce que montre l’étude sur musique et démence
Les auteurs ont suivi des adultes de 70 ans et plus et ont classé leurs habitudes musicales (écoute, pratique instrumentale, combinaison des deux). Les résultats suggèrent que :
- Les personnes déclarant écouter régulièrement de la musique développent moins souvent une démence au cours du suivi.
- Celles qui jouent d’un instrument présentent également un risque moindre.
- La combinaison écoute + pratique est associée à un profil cognitif plus favorable, y compris pour des marqueurs intermédiaires (déclin cognitif léger, mémoire épisodique).
Autrement dit, la régularité et l’activité musicale semblent aller de pair avec un bénéfice cognitif marqué. Là encore, prudence : le dessin est observationnel. Mais l’ampleur de la cohorte, la rigueur du suivi et la cohérence des effets font de cette publication une référence récente sur le lien musique et démence.
Mécanismes plausibles : comment la musique pourrait agir
Pour comprendre le tandem musique et démence, il faut regarder ce que la musique fait au cerveau et au comportement :
1. Stimulation multisensorielle et cognitive
Écouter et/ou produire de la musique recrute des réseaux distribués (auditif, fronto-pariétal, préfrontal, cérébelleux), essentiels à l’attention soutenue, à la mémoire de travail et à la flexibilité mentale.
2. Synchronisation temporelle auditivo-motrice
Suivre un tempo, marquer les temps, anticiper des accents rythmiques : ces tâches sollicitent les boucles perception-action, proches de celles entraînées dans des exercices rythmés en mouvement.
3. Régulation émotionnelle et stress
La musique peut diminuer la charge allostatique (tension physiologique) et améliorer l’humeur, facteurs indirectement liés au fonctionnement cognitif.
4. Lien social et motivation
Chorales, ensembles, ateliers : la musique crée des rendez-vous, de la pratique régulière et un sentiment d’appartenance – trois ingrédients clés du « bien vieillir ».
Ces mécanismes n’établissent pas une causalité, mais expliquent pourquoi, dans la vie de tous les jours, un engagement musical durable peut aller de pair avec de meilleurs indicateurs cognitifs.
Forces et limites : bien interpréter cette étude
L’étude présente plusieurs atouts : une large cohorte de personnes de 70 ans et plus avec un suivi méthodique, des résultats concordants qu’il s’agisse de l’écoute, de la pratique instrumentale ou de leur combinaison, et une cohérence avec des travaux antérieurs liant pratique musicale et cognition. Elle comporte aussi des limites : son dessin observationnel n’autorise qu’une association — sans prouver qu’augmenter l’exposition musicale prévient la démence —, les habitudes sont auto-rapportées (style, durée, intensité, pratique en groupe ou en solo), et des facteurs de confusion (niveau d’éducation, état de santé, activité physique, réseau social) peuvent persister. Il demeure nécessaire de conduire des essais interventionnels afin d’affiner la dose, la fréquence, les modalités et les profils les plus réceptifs.
En conclusion méthodologique, la relation entre musique et démence est prometteuse, mais demande une confirmation par des protocoles expérimentaux finement paramétrés.
Implications concrètes pour la méthode Brain Ball©
Pour transformer l’évidence en pratique, gardons trois principes :
- Accessibilité : L’écoute musicale est simple à instaurer au quotidien : au lever, pendant une marche, lors d’une pause.
- Progressivité : On part d’une écoute attentive (pulsation claire), on ajoute le marquage du tempo (pied, mains, balle souple), puis de courtes séquences auditivo-motrices.
- Sécurité et plaisir : On débute assis si l’équilibre est fragile, on augmente la complexité quand la stabilité le permet, en gardant le plaisir comme moteur d’adhésion.
Dans une séance Brain Ball, la musique et le rythme servent de fil conducteur du début à la fin : on installe immédiatement la pulsation, on travaille des motifs simples, on coordonne regard et geste sur métronome ou musique (souvent 80–110 bpm), puis on complexifie en double tâche — marcher tout en marquant le rythme, lancer-attraper en respectant les changements de consignes. On ajuste le tempo, la durée, la fréquence et le niveau d’exigence selon le public. Cette logique répond aux déterminants clés de la relation entre musique et démence : rythmicité, engagement, régularité, ancrage social.
En savoir plus
Jaffa, E., Wu, Z., Owen, A., & Ryan, J. (2025, October 14). What is the association between music-related leisure activities and dementia risk? A cohort study. International Journal of Geriatric Psychiatry, 40(10), e70163. https://doi.org/10.1002/gps.70163
Arafa, A., Eshak, E. S., Iso, H., & others. (2022). Playing a musical instrument and the risk of dementia: A population-based cohort study. Preventive Medicine, 154, 106910. https://doi.org/10.1016/j.ypmed.2021.106910
Monash University / EurekAlert. (2025, October 21). Listening to or playing music over 75 linked to up to 39% reduction in dementia risk, study of over 10,800 finds. https://www.eurekalert.org/news-releases/1102855
EMJ Reviews. (2025, Oct.). Listening to and Playing Music for Dementia Prevention.
FAQ sur « Musique et démence »
La musique peut-elle vraiment aider à éviter la démence ?
On ne peut pas « garantir » d’éviter la démence en écoutant de la musique. La nouvelle étude montre surtout une association : chez des personnes de 70 ans et plus, celles qui écoutent souvent ou pratiquent la musique ont moins souvent développé une démence pendant le suivi. Ce n’est pas une preuve de causalité, mais la musique reste une habitude simple, sûre et motivante pour stimuler l’attention, la mémoire et le lien social. À combiner avec d’autres piliers du bien vieillir (activité physique, sommeil, alimentation, suivi médical). Si vous notez des troubles (mémoire, équilibre), parlez-en à un professionnel de santé.
Faut-il jouer d’un instrument pour en bénéficier ?
Pas nécessairement. L’écoute régulière est déjà liée à un risque plus faible. Jouer d’un instrument s’accompagne aussi d’un bénéfice potentiel, et combiner écoute et pratique paraît particulièrement intéressant. Le tout doit rester progressif et plaisant, condition d’une bonne adhésion.
Quel style de musique choisir ?
L’étude ne désigne pas de style supérieur. En pratique, on privilégie une musique appréciée dont la pulsation est facile à suivre pour travailler la synchronisation et l’anticipation temporelle. Les bénéfices possibles tiennent autant à l’engagement qu’au genre musical.
Comment Brain Ball© intègre-t-il ces éléments ?
La méthode utilise des séquences rythmées pour relier audition, vision et mouvement, avec une progression qui va de tâches simples à des doubles tâches sécurisées. L’objectif est d’améliorer la précision temporelle, l’attention et la confiance motrice, en écho aux mécanismes plausibles discutés par la littérature et illustrés par l’étude de 2025.