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Fonctions exécutives et équilibre : un duo au service de la prévention des chutes

Oct 2025

On imagine souvent que l’équilibre se joue eau niveau des chevilles et de l’oreille interne. C’est vrai… mais incomplet. Le cortex préfrontal (le “chef d’orchestre” du cerveau) mobilise l’attention, l’inhibition (filtrer les distractions) et la flexibilité (s’adapter vite) pour stabiliser la posture, surtout quand l’environnement devient incertain ou quand on fait deux choses à la fois. En d’autres termes, l’équilibre engage le corps autant que le cerveau : intégrer et hiérarchiser les informations sensorielles, sans se laisser perturber. Une vision ancienne désormais bien étayée par la littérature scientifique.

 

Ce que montrent les études récentes

• Perturbations sensorielles et réponse préfrontale

Quand on perturbe les repères sensoriels (vue, oreille interne, sensations plantaires), deux effets concomitants apparaissent chez l’adulte debout : l’activation du cortex préfrontal augmente et le balancement postural (“sway”) s’amplifie, signe d’un contrôle plus coûteux. Une étude expérimentale récente met en évidence une activation particulièrement marquée des régions dorso-médiane et dorso-latérale, avec des liens directionnels surtout sur l’axe avant-arrière (Baradaran et al., 2025).

• Double-tâche et coût attentionnel

Dès qu’on ajoute une double-tâche (penser en bougeant), l’oxygénation préfrontale monte systématiquement, reflet d’un coût attentionnel supplémentaire. Des revues fNIRS chez les personnes âgées montrent que les doubles-tâches exigeant inhibition et flexibilité “tirent” davantage sur le préfrontal que de simples tâches mnésiques (Woollacott & Shumway-Cook, 2002 ; Lapanan et al., 2023 ; Ross et al., 2021).

• Direction du balancement et risque de chute

Au-delà de l’intensité du sway, sa direction compte. Le sway médio-latéral (gauche-droite) est souvent plus sensible et plus prédictif du risque de chute chez les seniors que l’axe avant-arrière, comme l’indiquent des études prospectives et des synthèses méthodiques sur les variables du centre de pression (Maki et al., 1994 ; Quijoux et al., 2020).

• Une synthèse méta-analytique

Une méta-analyse récente conclut à une association robuste entre fonctions exécutives et équilibre dynamique, avec un effet particulièrement fort pour le postural sway parmi les tests courants. Plus l’exécutif est performant, mieux on gère les situations d’équilibre exigeantes — et inversement (Divandari et al., 2024).

 

Équilibre et fonctions exécutives : impacts concrets dans la vie réelle

• Vie quotidienne : des doubles-tâches à chaque pas

Tenir un plateau en discutant, traverser une rue animée ou descendre un trottoir encombré sont des doubles-tâches permanentes. Elles mobilisent les fonctions exécutives autant que les chevilles ou les hanches. Comprendre que le cortex préfrontal participe directement au contrôle postural aide à expliquer certaines fragilités. Fatigue, stress, médicaments, troubles de l’attention… peuvent se traduire par un équilibre moins net, surtout si les repères sensoriels sont défavorables.

• Prévenir les chutes : maîtriser la charge cognitive

Ce lien cerveau-corps invite à être attentif aux situations à forte charge cognitive (parler au téléphone en marchant vite, porter des sacs tout en répondant à quelqu’un, etc.) et à donner une place au travail attentionnel dans l’accompagnement. L’axe médio-latéral est un bon baromètre de vigilance chez les plus de 60 ans (Maki et al., 1994 ; Quijoux et al., 2020).

Sport-santé : des repères pour stabiliser sans rigidifier

Mieux comprendre ce pilotage exécutif explique pourquoi des pratiques mêlant attention, décision et mouvement sont perçues comme “stabilisantes” tout en restant ludiques. Un tempo régulier peut cadrer l’attention et améliorer la fluidité, tandis que des repères visuels clairs réduisent l’incertitude posturale (Woollacott & Shumway-Cook, 2002). 

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En quoi cela résonne avec la pratique Brain Ball

Le Brain Ball associe mouvement, prise d’information visuelle (couleurs, trajectoires), rythme (tempo), consignes attentionnelles et coordination. Ce mix crée une double-tâche douce qui mobilise le préfrontal tout en sollicitant la multisensorialité (vue, audition, système vestibulaire). La recherche éclaire trois points clés qui font écho à cette pratique :

  • L’équilibre n’est pas qu’une affaire “mécanique” : le cerveau organise la stabilité en contexte réel. Dans le acs du Brain Ball, suivre la bonne couleur au bon moment oblige le cerveau à intégrer ces signaux pour stabiliser le tronc tout en coordonnant bras et jambes. On entraîne donc la stabilité pilotée par le cerveau, pas uniquement par la force.
  • La charge attentionnelle et la qualité des repères sensoriels modulent directement la stabilité. Plus la tâche demande d’attention, plus l’équilibre “coûte”. À l’inverse, des repères clairs canalisent l’attention et lissent le geste. Les consignes cadrées du Brain Ball — par exemple « attrape la balle bleue sur le tempo » — réduisent l’incertitude : on sait quoi faire et quand le faire. Les mouvements gagnent en fluidité et l’oscillation diminue.
  • Le contrôle latéral (gauche-droite) est un point sensible au quotidien : le plan médio-latéral est souvent le plus délicat à maîtriser. Côté Brain Ball, on peut le travailler simplement. Les exercices de passing en groupe, où l’on échange uniquement avec ses voisins de gauche et de droite, demandent un transfert de poids précis à chaque passe. Les balancements latéraux au son du métronome, qui consistent à passer d’un appui gauche à un appui droit sur la pulsation, entraînent également ce réglage avant même de lancer les engins.
    Ce contrôle latéral trouve des applications très concrètes : éviter un obstacle au dernier moment, changer de direction dans un couloir, attraper un objet posé sur le côté, descendre un trottoir ou monter dans un bus sans dévier, se relever d’une chaise en pivotant. Travaillés en douceur et en rythme, ces transferts renforcent une stabilité latérale utile et facilement transférable aux gestes de tous les jours.

 

Conclusion

L’équilibre est une coproduction du corps et du cerveau. Les fonctions exécutives — attention, inhibition, flexibilité — soutiennent le contrôle postural, surtout quand la situation se complexifie ou devient multitâche. En pratique, mieux gérer l’attention, soigner la qualité des repères sensoriels (visuels, rythmiques) et travailler spécifiquement le contrôle latéral contribuent à une stabilité plus sûre au quotidien. Comme moyen concret d’entraînement, des situations simples, rythmées et progressives — à l’image des exercices Brain Ball qui combinent repères visuels, tempo et coordination — offrent un terrain efficace pour faire coopérer cerveau et corps et améliorer la stabilité de façon transférable.

En savoir plus

  • Baradaran, Y., Fernandez Rojas, R., Goecke, R., & Ghahramani, M. (2025). Multimodal brain–body analysis of prefrontal cortex activity and postural sway with sensory manipulation. Computers in Biology and Medicine, 193, 110338. https://doi.org/10.1016/j.compbiomed.2025.110338

  • Woollacott, M., & Shumway-Cook, A. (2002). Attention and the control of posture and gait: A review of an emerging area of research. Gait & Posture, 16(1), 1–14. https://doi.org/10.1016/S0966-6362(01)00156-4

  • Divandari, N., Bird, M.-L., Vakili, M., & Jaberzadeh, S. (2024). The association between dynamic balance and executive function: Which dynamic balance test has the strongest association with executive function? A systematic review and meta-analysis. Current Neurology and Neuroscience Reports, 24(6), 151–161. https://doi.org/10.1007/s11910-024-01340-3

  • Maki, B. E., Holliday, P. J., & Topper, A. K. (1994). A prospective study of postural balance and risk of falling in an ambulatory and independent elderly population. Journal of Gerontology, 49(2), M72–M84. https://doi.org/10.1093/geronj/49.2.M72

  • Quijoux, F., Vienne-Jumeau, A., Bertin-Hugault, F., Zawieja, P., Lefèvre, M., Vidal, P.-P., & Ricard, D. (2020). Center of pressure displacement characteristics differentiate fall risk in older people: A systematic review with meta-analysis. Ageing Research Reviews, 62, 101117. https://doi.org/10.1016/j.arr.2020.101117

  • Johansson, J., Jarocka, E., Westling, G., Nordström, A., & Nordström, P. (2019). Predicting incident falls: Relationship between postural sway and limits of stability in older adults. Human Movement Science, 66, 117–123. https://doi.org/10.1016/j.humov.2019.04.004

  • Lapanan, K., Kantha, P., Putthinoi, S., & Vongsirinavarat, M. (2023). The prefrontal cortex hemodynamic responses to dual-task paradigms in older adults: A systematic review and meta-analysis. Heliyon, 9(7), e17812. https://doi.org/10.1016/j.heliyon.2023.e17812

  •  Ross, D., Wagshul, M. E., Izzetoglu, M., & Holtzer, R. (2021). Prefrontal cortex activation during dual-task walking in older adults is moderated by thickness of several cortical regions. GeroScience, 43(4), 1959–1974. https://doi.org/10.1007/s11357-021-00379-1

  •  Quijoux, F., Vienne-Jumeau, A., Bertin-Hugault, F., Zawieja, P., Lefèvre, M., Vidal, P.-P., & Ricard, D. (2021). A review of center of pressure (COP) variables to quantify standing balance in elderly people: Algorithms and open-access code. Physiological Reports, 9(22), e15067. https://doi.org/10.14814/phy2.15067

Stabilité & fonctions exécutives : passez à l’action

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FAQ sur le lien entre les fonctions exécutives et l’équilibre

L’équilibre dépend-il vraiment de l’attention ?

Oui. Quand on se concentre ou qu’on réalise une double-tâche, on observe une hausse de l’activité du cortex préfrontal, signe d’un surcoût attentionnel pour stabiliser la posture (Woollacott & Shumway-Cook, 2002 ; Ross et al., 2021). Plus récemment, des protocoles en fNIRS confirment cette implication préfrontale lorsque les repères sensoriels sont bousculés (Baradaran et al., 2025). L’équilibre est donc une coproduction cerveau-corps, pas uniquement une question de chevilles et de muscles.

Pourquoi parle-t-on autant du balancement “gauche-droite” ?

Parce que le sway médio-latéral (gauche-droite) est souvent plus sensible pour estimer la stabilité fonctionnelle, notamment chez les seniors (Maki et al., 1994). Des revues et méta-analyses montrent que certaines variables du centre de pression différencient mieux les personnes à risque de chute, avec une importance particulière de la dimension latérale (Quijoux et al., 2020). En pratique, surveiller et travailler cette direction a donc du sens dans le cadre de la prévention des chutes. 

Les repères visuels et le rythme peuvent-ils aider ?

La plupart du temps, oui. Des repères visuels stables réduisent l’incertitude posturale, et un cadre rythmique peut aider à canaliser l’attention et régulariser le mouvement (Woollacott & Shumway-Cook, 2002). L’intensité de cet effet dépend de l’âge, de l’état de santé et de la tâche ; mais globalement, la littérature montre que des repères visuels et rythmiques soutiennent le “pilotage exécutif” de l’équilibre (Ross et al., 2021).

Est-ce qu’“entraîner le cerveau” améliore automatiquement l’équilibre ?

Pas automatiquement. Les données établissent des liens solides entre fonctions exécutives et stabilité, et montrent un surcroît d’activation préfrontale dans les situations difficiles (Lapanan et al., 2023 ; Baradaran et al., 2025). Pour parler d’amélioration, il faut des programmes d’intervention avec mesures avant/après ; plusieurs synthèses suggèrent des bénéfices possibles selon les profils et le type de tâches (Divandari et al., 2024). En pratique, on progresse quand la charge cognitive est dosée et pertinente pour les objectifs visés.

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