Qui était Blanche Ducarne ?
Blanche Ducarne, de son nom complet Blanche Ducarne de Ribaucourt, est une figure fondatrice de la neuropsychologie francophone. Née à Paris le 19 novembre 1926, elle s’impose très tôt par son esprit brillant, sa culture humaniste et son engagement.
Blanche Ducarne grandit dans une famille protestante luthérienne intellectuelle. Après des études au collège Sévigné puis au lycée Lavoisier, elle poursuit un cursus de psychologie à la Sorbonne. En 1958, elle épouse Fernand Ducarne, résistant de la Seconde Guerre mondiale. Ensemble, ils auront deux enfants. Très impliquée dans les questions sociétales, elle prend en charge des blessés de guerre au Val-de-Grâce, collaborant avec le général Lefebvre.
Blanche Ducarne et la naissance de la neuropsychologie clinique
À l’âge de 21 ans, Blanche Ducarne entre au service du Pr Théophile Alajouanine à l’hôpital de la Salpêtrière, un lieu central dans l’histoire de la neurologie. Elle participe avec lui et Olivier Sabouraud à la création du Centre du langage, une consultation novatrice pour la prise en charge de l’aphasie.
Blanche Ducarne y développe une approche sémiologique et dynamique des troubles du langage, rompant avec la vision figée et déficitaire alors dominante. Elle met notamment au point le « bilan de l’aphasie », une méthode encore utilisée aujourd’hui.
Son livre Rééducation sémiologique de l’aphasie (1986) reflète cette approche rigoureuse, centrée sur l’observation clinique fine plutôt que sur les seuls scores de tests.
Blanche Ducarne : une formatrice et clinicienne hors pair
Tout au long de sa carrière, Blanche Ducarne forme des générations d’orthophonistes et de neuropsychologues, dans une période où la discipline n’existe pas encore officiellement dans les universités françaises. Elle est reconnue pour son sens clinique exceptionnel, capable de poser un diagnostic en observant simplement la posture d’un patient.
Parmi ses nombreux collaborateurs, on compte les neurologues Paul Castaigne, André Buges, François Lhermitte, Bernard Pertuiset, ainsi que Jean-Louis Signoret, avec qui elle travaille sur les troubles de la mémoire.
Même confrontée au conservatisme de certains milieux médicaux, Blanche Ducarne réussit à créer sa propre unité de neuropsychologie dans le service du Pr Pierrot-Deseilligny, poursuivant ainsi ses recherches et son travail clinique.
Blanche Ducarne et les troubles neurovisuels
Dans les dernières années de sa carrière, Blanche Ducarne se passionne pour les troubles neurovisuels d’origine centrale, un domaine encore peu exploré à l’époque. Elle s’intéresse notamment à la cécité corticale et au phénomène du « blindsight », où un patient peut percevoir inconsciemment des stimuli visuels dans son champ aveugle.
Elle coécrit en 1993 avec Martine Barbeau un ouvrage de référence : Neuropsychologie visuelle : évaluation et rééducation. Ce livre reste une base précieuse pour les cliniciens et chercheurs spécialisés en neuropsychologie visuelle.
Un engagement pour les femmes et la science
Blanche Ducarne ne fut pas seulement une pionnière sur le plan scientifique. Elle fut aussi une militante contre les discriminations, notamment celles liées au genre dans les milieux médicaux et universitaires. Elle encouragea ses collègues et ses étudiantes à affirmer leur place, leur expertise, et à briser les barrières hiérarchiques.
Même proche de la retraite, elle reste passionnée par les nouveaux modèles cognitifs, cherchant à articuler les apports de la clinique et de la recherche théorique.
L’héritage de Blanche Ducarne en neuropsychologie
Le travail de Blanche Ducarne continue d’inspirer la neuropsychologie contemporaine. Elle a laissé un héritage durable : des concepts, des méthodes, des ouvrages, mais aussi une éthique professionnelle fondée sur l’écoute, la rigueur et la bienveillance.
Beaucoup de ses élèves et collègues témoignent encore aujourd’hui de son influence majeure sur leur parcours. Son exigence intellectuelle allait toujours de pair avec une grande humanité.
Pour aller plus loin :
- Ducarne de Ribaucourt B.. Rééducation sémiologique de l’aphasie. Paris : Masson, 1986
- De Ribaucourt, B. D., & Barbeau, M. (1993). Neuropsychologie visuelle : évaluation et rééducation. De Boeck.
- Chokron, S. (2020). Blanche Ducarne (1926-2018) : neuropsychologue et pionnière. Revue de Neuropsychologie, 12(1), 9-10. doi:10.1684/nrp.2019.0529
- Podcast Une journée particulière, épisode du dimanche 22 avril 2018 sur France Inter « 24 octobre 1985, la neuropsychologie à la Salpêtrière : une découverte pour Sylvie Chokron«
FAQ
Qui était Blanche Ducarne de Ribaucourt ?
Blanche Ducarne de Ribaucourt (1926–2018) était une neuropsychologue française spécialisée dans l’évaluation et la rééducation des troubles du langage, notamment l’aphasie. Elle a contribué à structurer les pratiques cliniques en neuropsychologie en France.
Quels sont les apports majeurs de Blanche Ducarne ?
Elle a développé des outils d’évaluation et des méthodes de rééducation des troubles du langage et des fonctions visuelles, et a formé de nombreux professionnels de santé, en particulier des orthophonistes.
Elle a introduit une approche sémiologique fine et dynamique, opposée à une vision statique du handicap, et mis au point un bilan innovant utilisé encore aujourd’hui.
Blanche Ducarne a-t-elle écrit des livres ?
Oui, elle est l’autrice de Rééducation sémiologique de l’aphasie (1986) et coautrice de Neuropsychologie visuelle : évaluation et rééducation (1993).
Quel est l’héritage de Blanche Ducarne en neuropsychologie ?
Son travail a structuré les pratiques d’évaluation et de rééducation en neuropsychologie, et ses outils et méthodes sont encore utilisés aujourd’hui. Elle est reconnue pour son approche rigoureuse et humaniste de la prise en charge des troubles du langage.