Glossaire

Qu’est-ce que l’attention conjointe ?

L’attention conjointe désigne la capacité à partager une attention avec une autre personne sur un même objet, événement ou sujet. Elle implique que deux individus soient conscients de porter leur attention sur la même chose et qu’ils reconnaissent cette attention partagée.

Cette compétence émerge dès les premiers mois de vie et joue un rôle fondamental dans le développement des interactions sociales, du langage et de la cognition. En tant que psychomotricien, nous y portons une attention toute particulière, car elle reflète l’engagement dans une relation et prépare l’enfant à la communication symbolique.

 

Les composantes de l’attention conjointe

L’attention conjointe repose sur trois piliers essentiels :

    • L’orientation de l’attention : c’est la capacité de suivre le regard ou le geste d’un autre vers un objet ou un événement.
    • La coordination des regards : elle permet d’établir un contact visuel avec l’interlocuteur avant ou après avoir dirigé l’attention vers l’objet.
    • L’intention de partager : c’est la volonté de faire découvrir ou de montrer quelque chose à l’autre, avec une intention communicative

Ces éléments mobilisent à la fois les fonctions motrices (regard, gestes), cognitives (compréhension des intentions de l’autre) et affectives (désir d’entrer en lien).

 

Le développement de l’attention conjointe chez l’enfant

L’attention conjointe apparaît généralement entre 9 et 12 mois, avec des variations selon les enfants. On distingue plusieurs étapes dans son développement :

    • Avant 6 mois : l’enfant répond à des stimulations sociales, mais ne coordonne pas encore son attention avec autrui.
    • Vers 6-9 mois : il commence à suivre le regard ou le pointage d’un adulte, sans nécessairement comprendre l’intention communicative.
    • Entre 9 et 12 mois : l’enfant suit activement le pointage, regarde successivement l’objet et l’adulte. Il commence à initier lui-même des épisodes d’attention conjointe.
    • Vers 12-18 mois : ces échanges deviennent plus fréquents et servent de base à l’apprentissage du langage et des interactions complexes.

L’absence ou le retard dans ces étapes peut être un signe d’alerte pour certains troubles neurodéveloppementaux, notamment les troubles du spectre de l’autisme (TSA).

 

L’attention conjointe dans le TSA

Chez les enfants ayant un trouble du spectre de l’autisme, l’attention conjointe est souvent perturbée, tant dans la capacité à répondre qu’à initier des épisodes d’attention partagée.

Les recherches ont montré que le déficit d’attention conjointe est l’un des marqueurs précoces du TSA, observable dès la fin de la première année de vie (Mundy et al., 2007). Ces enfants peuvent par exemple :

  • Ne pas suivre le regard ou le pointage d’un adulte
  • Ne pas montrer d’objet de manière spontanée
  • Avoir du mal à établir un contact visuel coordonné

Ces difficultés peuvent limiter le développement du langage, de l’imitation, de l’empathie et de la compréhension sociale. En psychomotricité, tout l’enjeu est de soutenir cette compétence en proposant des médiations adaptées, ludiques et engageantes.

> Lire à ce sujet, notre article : Autisme et communication : comment faciliter les échanges ?

Soutenir l’attention conjointe en psychomotricité

L’approche psychomotrice privilégie le corps en mouvement, la relation et le jeu pour développer les compétences sociales. Pour favoriser l’attention conjointe, plusieurs leviers peuvent être utilisés :

1. Utiliser des objets médiateurs

Des balles, instruments, peluches ou objets lumineux peuvent être présentés et manipulés en duo. L’objet devient alors un tiers qui attire et soutient l’attention partagée.

2. Proposer des jeux de tour de rôle

Des activités simples où chacun attend son tour encouragent l’alternance des regards, des gestes, et favorisent l’imitation mutuelle.

3. Mettre en place des routines rythmées

Des chansons à gestes, des exercices en musique ou des jeux de balancement facilitent l’anticipation, l’attention auditive et la coordination avec autrui.

4. Offrir un cadre sécurisant

Un espace calme, structuré visuellement et temporellement (planning visuel, repères fixes) aide à canaliser l’attention et réduire les distracteurs sensoriels.

> L’attention conjointe est ainsi sollicitée et renforcée, non par des injonctions, mais par le plaisir partagé dans l’action.

 

Enjeux pour la communication et l’apprentissage

L’attention conjointe est un précurseur du langage. Elle permet de :

    • Apprendre de nouveaux mots en les associant à des objets partagés
    • Comprendre les intentions de l’autre
    • Se repérer dans les échanges sociaux (qui parle à qui, de quoi ?)

Chez les enfants ayant un développement typique, elle prépare la compréhension symbolique, les jeux d’imagination, les conversations. Chez les enfants avec TSA ou troubles du développement, stimuler précocement l’attention conjointe peut améliorer la qualité des interactions et les apprentissages.

Pour aller plus loin :

  • Mundy, P., Sigman, M., & Kasari, C. (1990). A longitudinal study of joint attention and language development in autistic children. Journal of autism and developmental disorders, 20(1), 115–128. https://doi.org/10.1007/BF02206861
  • Bastier, C. (2019). Faciliter la communication et le développement sensoriel des personnes avec autisme. Dunod.

 

FAQ

À quel âge apparaît l’attention conjointe ?

L’attention conjointe émerge entre 9 et 12 mois chez la plupart des enfants. Elle se développe ensuite de façon plus complexe jusqu’à 18 mois, devenant un socle pour le langage et les relations sociales.

Pourquoi l’attention conjointe est-elle importante pour le langage ?

Elle permet à l’enfant d’associer un mot à un objet ou une action en contexte partagé. L’enfant apprend que les mots sont liés à des choses que l’on regarde ensemble, ce qui est essentiel pour l’acquisition du vocabulaire.

Comment repérer un déficit d’attention conjointe ?

Un enfant qui ne suit pas le regard ou le geste d’un adulte, qui ne montre pas spontanément des objets, ou qui évite les échanges de regard au-delà de 12 mois, peut présenter un déficit. Cela nécessite une observation fine et éventuellement une évaluation spécialisée.

Peut-on améliorer l’attention conjointe ?

Oui, à travers des jeux interactifs, des médiations corporelles ou ludiques, et une posture relationnelle ajustée. La psychomotricité, l’orthophonie ou les approches éducatives structurées peuvent apporter un soutien ciblé.

Nuage de Mots - Attention conjointe
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