© Sandrine PELLET
Le vieillissement est souvent associé à une diminution de la vitesse de traitement de l’information et de la capacité à gérer plusieurs tâches simultanément. Pour contrer ces effets, l’entrainement à la double-tâche propose de solliciter à la fois les fonctions motrices et cognitives du cerveau. Chez les seniors, cet entraînement permet non seulement de stimuler la coordination visuomotrice et auditivomotrice, mais aussi de ralentir le déclin cognitif et de réduire le risque de chute.
Les effets du vieillissement sur l’attention partagée et la plasticité cérébrale
Avant de mettre en place un programme en double tâche, il est essentiel de comprendre comment le cerveau des seniors évolue avec l’âge.
- Baisse de l’attention partagée
Les études montrent qu’avec l’avancée en âge, le cerveau devient moins efficace pour répartir ses ressources entre plusieurs activités simultanées. Cette diminution affecte particulièrement la capacité à maintenir un équilibre tout en traitant une information cognitive (Al-Yahya et al., 2010). - Ralentissement du traitement de l’information
La vitesse de traitement des neurones se réduit, ce qui peut rendre plus difficile la coordination entre mouvements et fonctions exécutives. - Résilience de la plasticité cérébrale
Malgré ces changements, le cerveau conserve sa capacité à se réorganiser : un entraînement adapté peut renforcer les connexions entre les réseaux attentionnels et moteurs, favorisant ainsi une meilleure performance globale.
Ces observations soulignent l’intérêt d’exercices conçus pour mobiliser simultanément le corps et l’esprit, afin d’exploiter au mieux la plasticité résiduelle du cerveau senior.
Protocoles d’exercices en double tâche pour les seniors
Pour être efficaces, les exercices de double tâche doivent suivre une progression structurée. Voici quelques propositions de protocoles à adapter selon le niveau de chacun.
> Introduction des phases d’entraînement
Commencez toujours par une phase d’échauffement motrice seule, pour préparer le corps et le mental. Ensuite, ajoutez progressivement une composante cognitive afin d’habituer le participant à gérer la double stimulation.
- Phase 1 : échauffement moteur seul (5 minutes)
Par exemple, une marche à allure modérée ou des exercices d’équilibre statique. - Phase 2 : introduction de la tâche cognitive (10 minutes)
Le senior effectue de l’arithmétique simple ou nomme des objets pendant qu’il marche. - Phase 3 : double tâche à intensité complète (10–15 minutes)
Combinez marche ou exercices d’équilibre avec des activités plus exigeantes, comme la mémorisation de séries de mots ou la répétition de séquences sonores.
En respectant cette progression, vous maximisez la sécurité et l’adhésion du participant à l’entraînement.
> Exemples d’exercices pratiques
Pour diversifier les séances et maintenir la motivation, voici trois exercices simples à intégrer :
- Marche & calcul mental
Pendant une marche en couloir, demandez au senior de résoudre des additions de deux chiffres à haute voix. - Ballon & mémoire sérielle
Lancez une petite balle contre un mur ; à chaque réception, le participant énonce un mot d’une liste qu’il doit mémoriser. - Équilibre & dénomination d’images
Proposez au senior de tenir en équilibre unipodal tout en nommant des images présentées sur une tablette.
Chacun de ces exercices peut être modulé en difficulté : varier la vitesse de marche, la longueur des listes à mémoriser ou le temps de maintien de l’équilibre. L’idée est de trouver le juste équilibre entre challenge et sécurité.
Bénéfices cliniques et préventifs de la double tâche
La pratique régulière d’exercices double tâche auprès des seniors présente plusieurs avantages majeurs :
- Renforcement de la coordination visuomotrice et auditivomotrice
En travaillant simultanément sur le mouvement et la perception, on observe une amélioration durable de l’équilibre et de la réactivité. - Réduction du risque de chute
Les programmes de double tâche ont démontré une diminution significative des chutes chez les seniors, grâce à une meilleure gestion de l’attention partagée. - Ralentissement du déclin cognitif
Les fonctions exécutives et la mémoire de travail sont particulièrement sollicitées, entraînant des adaptations cérébrales bénéfiques et un maintien des performances cognitives.
Ces bénéfices combinés contribuent à préserver l’autonomie des seniors dans leurs activités quotidiennes et à améliorer leur qualité de vie.
En savoir plus
Al-Yahya, E., Dawes, H., Smith, L., Dennis, A., Howells, K., & Cockburn, J. (2010). Cognitive motor interference while walking : A systematic review and meta-analysis. Neuroscience & Biobehavioral Reviews, 35(3), 715‑728. https://doi.org/10.1016/j.neubiorev.2010.08.008
- Beauchet, O., Annweiler, C., Callisaya, M. L., De Cock, A., Helbostad, J. L., Kressig, R. W., Srikanth, V., Steinmetz, J., Blumen, H. M., Verghese, J., & Allali, G. (2016). Poor Gait Performance and Prediction of Dementia : Results From a Meta-Analysis. Journal Of The American Medical Directors Association, 17(6), 482‑490. https://doi.org/10.1016/j.jamda.2015.12.092
Silsupadol, P., Shumway-Cook, A., Lugade, V., Van Donkelaar, P., Chou, L., Mayr, U., & Woollacott, M. H. (2009). Effects of Single-Task Versus Dual-Task Training on Balance Performance in Older Adults : A Double-Blind, Randomized Controlled Trial. Archives Of Physical Medicine And Rehabilitation, 90(3), 381‑387. https://doi.org/10.1016/j.apmr.2008.09.559
FAQ sur les Exercices de Double-Tâche pour les seniors
Qu’est-ce qu’un exercice de double tâche pour senior ?
Un exercice de double tâche combine simultanément une activité motrice (comme la marche, l’équilibre ou la manipulation d’objets) et une activité cognitive (calcul mental, mémorisation de mots, etc.). Cette approche stimule la capacité d’attention partagée et renforce la coordination entre les fonctions motrices et cognitives.
Pourquoi privilégier le double tâche dans la prévention du déclin cognitif ?
Le double tâche sollicite de façon ciblée les réseaux cérébraux liés à l’attention, à la mémoire de travail et à la motricité, provoquant ainsi des adaptations cérébrales bénéfiques. Ces adaptations contribuent à ralentir le déclin cognitif et à maintenir l’autonomie des seniors dans leurs activités quotidiennes.
Le double tâche est-il adapté à tous les niveaux de dépendance ?
Oui : les exercices peuvent être modulés en intensité et en complexité pour convenir aux seniors autonomes comme à ceux en perte d’autonomie. Une évaluation initiale permet de déterminer le niveau de difficulté adapté et d’ajuster le programme en fonction des progrès.
Y a-t-il des risques ou des limites à cet entraînement ?
Quelques enfants présentent des difficultés motrices ou attentionnelles, nécessitant une adaptation du rythme ou du matériel. Il faut individualiser le protocole et envisager une durée d’entraînement plus longue pour consolider les acquis.