© Sandrine Pellet
Pendant longtemps, le vieillissement cognitif a été présenté comme une fatalité : après un pic de performance dans la jeunesse, on descendrait inexorablement vers l’oubli et la perte de capacités intellectuelles. Ce récit très répandu — voire pop-culturel — s’appuie sur l’idée que les compétences comme la mémoire, l’attention ou la rapidité de traitement déclinent graduellement dès l’âge adulte.
Pourtant, ce modèle s’avère trop grossier, voire obsolète. Les études longitudinales (c’est-à-dire celles qui suivent les mêmes individus sur plusieurs années) ont mis en lumière que le déclin cognitif démarre souvent plus tardivement que ce que la croyance populaire suppose, et qu’il n’est pas homogène d’une personne à l’autre.
Par exemple, on distingue deux grandes catégories de fonctions cognitives :
- l’intelligence fluide (mémoire de travail, raisonnement abstrait, traitement rapide de l’information) qui est plus susceptible de décroître avec l’âge ;
- l’intelligence cristallisée (vocabulaire, savoirs acquis, expertise) qui souvent se maintient, voire progresse, avec l’expérience et l’accumulation des connaissances.
Ainsi, un individu âgé peut compenser une réduction de vitesse de traitement par une meilleure stratégie, un recours à l’expérience, ou des processus cognitifs plus efficaces. Les capacités cognitives ne sont donc pas uniformément condamnées à décliner mais évoluent selon les trajectoires individuelles, les habitudes de vie, et les stimulations reçues.
L’article de Sciences Humaines « Le déclin cognitif, plus tardif que prévu » souligne d’ailleurs cette perspective :
« Les études longitudinales […] ont permis d’établir un tableau plus nuancé du déclin cognitif […]. Aujourd’hui, les scientifiques situent le début de cet affaiblissement non pas à 20, mais plutôt à 50, 55, voire 60 ans. »
Cela ne signifie pas que le vieillissement cognitif est illusoire, mais qu’il est modulable — et qu’il existe des leviers pour le freiner.
Plasticité cérébrale et rôle des expériences
Au cœur de ce réexamen se trouve un principe fondamental : la plasticité cérébrale — c’est-à-dire la capacité du cerveau à se remodeler, à créer de nouvelles connexions synaptiques ou à renforcer les anciennes en fonction des stimulations. Même à l’âge adulte avancé, le cerveau conserve une forme de plasticité, quoique plus modeste qu’à l’enfance.
• Mécanismes biologiques : synapses, potentialisation à long terme et réserve cognitive
La plasticité se manifeste notamment via la potentialisation à long terme (PLT), un mécanisme par lequel les synapses se renforcent durablement lorsqu’elles sont activement sollicitées. Ce renforcement est considéré comme un des fondements biologiques de l’apprentissage et de la mémoire.
Mais, au-delà de la plasticité pure, il y a le concept de réserve cognitive : certaines personnes peuvent tolérer des lésions cérébrales (ou des altérations liées au vieillissement) sans montrer de signes cliniques, en mobilisant des réseaux neuronaux alternatifs ou des stratégies compensatrices. Ce concept rend compte des grandes différences interindividuelles constatées dans le vieillissement cognitif (Bier & Belleville, 2010).
Les expériences, l’apprentissage continu et la stimulation progressive des fonctions cognitives renforcent cette réserve. Par exemple, des métiers cognitivement exigeants, des loisirs intellectuels (lecture, musique, langues) ou des pratiques artistiques sont associés à un vieillissement cognitif plus favorable.
• Le rôle de l’environnement et des habitudes de vie
La plasticité n’est pas un simple « réservoir » passif : elle dépend des entrées sensorielles, de l’intensité de stimulation, du contexte émotionnel et de l’engagement actif. Si le cerveau n’est pas « utilisé », certaines connexions s’effacent par un processus de “sélection synaptique”. On dit parfois que les circuits non utilisés s’atrophient (Plasticité Cérébrale : Et Si On S’occupait de la Santé de Notre Cerveau ? · Inserm, la Science Pour la Santé, s. d.).
De plus, le sommeil, la nutrition, la gestion du stress et l’activité physique jouent un rôle central dans le maintien de la plasticité. Par exemple, la recherche montre que l’activité physique induit la libération de facteurs neurotrophiques (comme le BDNF, Brain-Derived Neurotrophic Factor) qui favorisent la survie neuronale, la croissance dendritique et la neurogenèse (Tari et al., 2025).
Enfin, des projets tels qu’AGEING PLASTICITY s’intéressent précisément à la manière dont les activités stimulantes (physiques, cognitives) modifient la structure du cerveau à l’âge avancé, et renforcent la résilience au déclin cognitif.
Bref : le cerveau est plastique tant qu’on le sollicite — d’où l’intérêt de l’intervention active.
Comment retarder le déclin cognitif ?
S’il n’existe pas de panacée pour annuler le vieillissement cérébral, de nombreuses stratégies fondées sur des données scientifiques peuvent ralentir ou freiner le déclin cognitif. Voici les principales :
1. Activité physique régulière (aérobie, renforcement, exercices combinés)
L’activité physique est l’un des piliers les plus solides de la prévention cognitive. De multiples revues systématiques et méta-analyses montrent que :
- L’exercice aérobie (par exemple la marche rapide, le vélo, la natation) améliore la mémoire, les fonctions exécutives et le volume de l’hippocampe (De la Rosa et al., 2020 / Silva et al., 2024).
- Le renforcement musculaire (résistance) contribue également à des bénéfices cognitifs, notamment sur l’attention et les fonctions visuo-spatiales.
- Les programmes combinant exercice physique et tâches cognitives (double tâche) tendent à produire des effets supérieurs.
- Une récente revue indique que 52 heures cumulées d’exercice sont liées à une meilleure performance cognitive chez les adultes âgés (Gomes-Osman et al., 2018).
Ainsi, c’est une stratégie à la fois accessible, peu coûteuse et efficace pour soutenir le cerveau.
2. Stimulation cognitive continue et variée
L’entraînement mental (jeux, puzzles, langues, musique, formation continue) est un autre levier intéressant. Il permet de stimuler des circuits neuronaux, d’entretenir la réserve cognitive et d’induire des adaptations synaptiques même tard dans la vie (Bier & Belleville, 2010).
L’idée est de varier les sollicitations cognitives et d’introduire une part de nouveauté pour contraindre le cerveau à s’adapter — par exemple apprendre une langue, jouer d’un instrument, suivre une formation, faire du codage, etc.
La solitude et l’isolement social sont des facteurs de risque reconnus du déclin cognitif. Participer à des groupes, maintenir des liens intergénérationnels, échanger, s’engager dans des projets collectifs, ou jouer en interaction avec d’autres contribue à stimuler le cerveau et à maintenir une dynamique intellectuelle.
4. Hygiène de vie globale
- Sommeil réparateur : un mauvais sommeil altère les processus de consolidation mnésique et la plasticité.
- Nutrition cérébro-protectrice : régimes riches en oméga-3, antioxydants, polyphénols (ex. régime méditerranéen, régime MIND) montrent des associations avec un vieillissement cognitif plus favorable.
- Contrôle du stress : le stress chronique, en augmentant les glucocorticoïdes, peut altérer l’hippocampe et la plasticité synaptique.
- Absence de substances toxiques : alcool, tabac, psychotropes non nécessaires, etc.
5. Interventions multi-domaines
Les résultats les plus solides proviennent d’approches qui combinent plusieurs leviers (activité physique, entraînement cognitif, alimentation de type MIND, interactions sociales et suivi cardio-métabolique). Une étude américaine récente (2025) chez des adultes âgés à risque a montré qu’un programme multidomaine mené sur 24 mois améliore modestement mais significativement la cognition globale, avec un bénéfice supérieur lorsque l’accompagnement est structuré par rapport à une version auto-guidée (Baker et al., 2025). Autrement dit, l’approche globale fait mieux qu’un levier isolé, sans pour autant quantifier le gain en « années » d’âge cognitif.
C’est précisément dans cette logique intégrée que Brain Ball
se positionne — en tant qu’outil combinant trois dimensions : motrice, cognitive et sociale.
1. Dimension motrice : sollicitation physique adaptée
Le Brain Ballcoordination œil-main, l’équilibre, la proprioception. Cette activation corporelle s’inscrit dans les recommandations d’activité physique pour le cerveau : mêler stimulus physique et cognitifs est un double levier précieux.
, par son concept — jouer, lancer, attraper, coordonner — accroît la sollicitation motrice, la
2. Dimension cognitive : stimulation en situation
Contrairement à des exercices cognitifs purs (puzzles, jeux sur écran), le Brain Ballmémoire de travail et la vitesse de traitement. La variation des situations et des contraintes (temps, défis, complexité) impose un apprentissage dynamique et non répétitif, ce qui augmente la plasticité.
exige des réactions immédiates, de l’anticipation, des choix moteurs et de la stratégie, ce qui met en jeu les fonctions exécutives, l’attention, la
Le Brain Ball
se pratique principalement en groupe, favorisant l’échange, la communication, le soutien mutuel. L’interaction sociale augmente la motivation, la régularité de la pratique, et constitue à elle seule un facteur protecteur du déclin cognitif.
4. Synergie des trois dimensions
Ce qui rend le Brain Ball
unique, c’est la combinaison harmonieuse des dimensions motrice, cognitive et sociale.Les participants ne pratiquent pas seulement une activité physique : ils s’engagent dans un sport intelligent, qui sollicite la réflexion autant que le mouvement.
Ils ne jouent pas uniquement à un jeu cognitif : ils évoluent dans un contexte corporel et collectif, où chaque interaction enrichit l’expérience.
Cette alliance du corps, de l’esprit et du lien social correspond exactement à l’approche préconisée par la recherche actuelle. De nombreuses études montrent en effet que les interventions multi-domaines — associant activité physique, stimulation cognitive et échanges sociaux — sont les plus efficaces pour retarder le déclin cognitif et entretenir la santé cérébrale.
5. Alignement avec les résultats scientifiques
En mobilisant simultanément motricité, attention et interaction sociale, le Brain Ball
entre dans la catégorie d’interventions « double tâche » (physique + cognitif), souvent plus efficaces que l’exercice seul.Il contribue à construire et entretenir la réserve cognitive en proposant des situations changeantes, nouvelles, adaptatives.
Enfin, par la dimension ludique, il favorise l’adhésion, la constance et le plaisir — des vecteurs essentiels de régularité dans le temps, ce qui est souvent le frein pour les publics seniors.
6. Conseils pour intégrer le Brain Ball dans une démarche de prévention
Pour tirer pleinement parti des bénéfices du Brain Ball
et en faire un véritable levier de prévention du déclin cognitif, quelques principes simples permettent d’organiser la pratique de manière efficace et durable.- Régularité : prévoir des séances fréquentes (au moins 1 à 2 fois par semaine) pour créer un “entretien cérébral”.
- Progressivité : augmenter la complexité, la vitesse, les contraintes, pour maintenir un stress contrôlé positif.
- Variabilité : changer les formats, les types d’engins, les configurations pour éviter la routine.
- Complémentarité : encourager d’autres pratiques (lecture, cours, social, marche, etc.) autour du Brain Ball pour renforcer l’effet global.
En bref, le Brain Ball
n’est pas seulement un jeu : c’est un outil calibré pour répondre aux exigences d’un vieillissement cognitif actif, en phase avec les connaissances scientifiques actuelles.
En savoir plus
Gomes-Osman, J., Cabral, D. F., Morris, T. P., McInerney, K., Cahalin, L. P., Rundek, T., Oliveira, A., & Pascual-Leone, A. (2018). Exercise for cognitive brain health in aging: A systematic review for an evaluation of dose. Neurology: Clinical Practice, 8(3), 257–265. https://doi.org/10.1212/CPJ.0000000000000460
Pettigrew, C., & Soldan, A. (2019). Defining cognitive reserve and implications for cognitive aging. Current Neurology and Neuroscience Reports, 19(1), 1. https://doi.org/10.1007/s11910-019-0917-z
Organisation mondiale de la Santé (OMS). (2019). Risk reduction of cognitive decline and dementia: WHO guidelines. Genève : OMS. https://www.who.int/publications-detail-redirect/risk-reduction-of-cognitive-decline-and-dementia
- Organisation mondiale de la Santé (OMS). (2021). Lignes directrices de l’OMS sur l’activité physique et la sédentarité. Genève : OMS. https://iris.who.int/bitstream/handle/10665/349728/9789240032118-fre.pdf
- Inserm. (2025, 29 avril). Plasticité cérébrale : et si on s’occupait de la santé de notre cerveau ? https://www.inserm.fr/actualite/plasticite-cerebrale-et-si-on-soccupait-de-la-sante-de-notre-cerveau/
- Sciences Humaines. (2025). Le déclin cognitif, plus tardif que prévu. https://www.scienceshumaines.com/le-declin-cognitif-plus-tardif-que-prevu/
Retarder le déclin cognitif – FAQ
À quel âge peut-on commencer à chercher à retarder le déclin cognitif ?
Il n’est jamais trop tôt ni trop tard pour retarder le déclin cognitif. Le cerveau conserve une plasticité tout au long de la vie, même après 60 ans. Les pratiques régulières comme le Brain Ball
, la lecture ou l’apprentissage de nouvelles compétences favorisent cette plasticité et ralentissent le vieillissement cognitif.Le Brain Ball
est un outil très efficace car il combine activité physique, stimulation cognitive et interactions sociales. Cependant, pour retarder le déclin cognitif de manière optimale, il est recommandé d’adopter une approche globale : activité physique régulière, alimentation équilibrée, sommeil réparateur et engagement social.À quelle fréquence pratiquer pour obtenir un effet ?
Des études suggèrent que l’effet cognitif devient perceptible à partir de quelques dizaines d’heures cumulées, souvent réparties sur plusieurs mois. Par exemple, 52 heures d’exercice sont associées à des gains cognitifs chez les seniors (Gomes-Osman et al., 2018). Une fréquence de 1 à 3 séances par semaine, selon l’intensité et la durée, est une bonne cible pour commencer.
Quelles activités du quotidien aident à retarder le déclin cognitif ?
Pour retarder le déclin cognitif, plusieurs habitudes de vie sont reconnues comme efficaces : rester actif physiquement (marche, activité adaptée comme la Brain Ball
), entretenir une stimulation intellectuelle régulière (lecture, jeux, apprentissages), préserver une vie sociale riche et gérer le stress. L’approche la plus efficace combine plusieurs de ces facteurs au quotidien.