© Sandrine PELLET
Le jonglage, une activité souvent perçue comme ludique et divertissante, cache en réalité un puissant mécanisme de stimulation cognitive. Il s’agit d’un exercice qui mobilise de nombreuses fonctions cérébrales, offrant ainsi des bénéfices non seulement pour la coordination, mais aussi pour la neuroplasticité.
La recherche scientifique s’accorde de plus en plus à reconnaître les effets positifs du jonglage sur la neuroplasticité du cerveau. Une revue systématique menée par J. Malik, R. Stemplewski et J. Maciaszek, chercheurs à l’Université de Poznań (Pologne), met en évidence les effets bénéfiques du jonglage comme activité à double tâche sur la structure et le fonctionnement du cerveau humain.
Jonglage et neuroplasticité : un champ de recherche prometteur
Dans leur étude intitulée « The Effect of Juggling as Dual-Task Activity on Human Neuroplasticity: A Systematic Review », les auteurs ont analysé près de 2 000 publications scientifiques pour identifier les études les plus pertinentes sur le sujet. Au final, 11 études ont été retenues pour la solidité de leur méthodologie et leurs résultats convergents : le jonglage stimule durablement la plasticité cérébrale.
Le jonglage, une activité motrice à double tâche
Le jonglage est bien plus qu’un simple exercice moteur : c’est une activité à double tâche, mobilisant simultanément des compétences physiques et cognitives. En lançant et en attrapant plusieurs objets à la fois, le jongleur sollicite :
- La coordination œil-main
- L’attention visuelle
- L’anticipation et la prise de décision rapide
- Le contrôle postural et l’équilibre
- Le traitement sensoriel (taille, poids, texture des balles)
Cette sollicitation simultanée de plusieurs fonctions cérébrales en fait un véritable entraînement pour le cerveau.
Sur le plan sensoriel, le jonglage mobilise des informations tactiles précises : taille, poids, texture des balles ou objets manipulés. Ces données sont analysées en temps réel par le cerveau pour ajuster les gestes. C’est ce que l’on appelle des rétrocontrôles sensoriels : des mécanismes de régulation qui permettent de corriger la trajectoire ou l’intensité d’un mouvement à chaque instant.
Grâce à ces rétroajustements constants, le cerveau est en permanence sollicité pour planifier, ajuster et synchroniser les actions motrices. Lorsque le jonglage est pratiqué en rythme ou en musique, comme dans les ateliers Brain Ball, les perceptions auditives viennent enrichir encore davantage les stimuli sensoriels, renforçant ainsi l’activation cérébrale globale.
Les études sont formelles : le jonglage optimise bien notre cerveau !
Les recherches analysées dans la revue systématique menée par l’Université de Poznań mettent en évidence quatre effets majeurs du jonglage sur le cerveau, observés à travers des techniques avancées comme l’IRM fonctionnelle :
• Augmentation de la matière grise dès la première semaine
Plusieurs études ont observé une augmentation significative de la matière grise dans l’hippocampe, une zone clé pour la mémoire et l’apprentissage, après seulement quelques jours de pratique du jonglage. Ce résultat suggère que les effets sur le cerveau peuvent apparaître très rapidement.
• Modifications neurovasculaires dans les aires sensorimotrices et visuelles
L’imagerie cérébrale a mis en évidence des changements dans les zones du cerveau impliquées dans le traitement sensoriel et le contrôle moteur, notamment chez de jeunes adultes. Ces modifications reflètent une adaptation neuronale à l’exécution répétée d’une tâche motrice complexe.
• Renforcement du cortex visuel chez les jongleurs expérimentés
Chez les pratiquants réguliers, des changements structurels durables ont été détectés dans le cortex visuel, en lien direct avec une meilleure perception du mouvement et une coordination œil-main plus efficace.
• Plasticité cérébrale maintenue chez les seniors
Chez les personnes âgées de 60 ans et plus, le jonglage stimule encore la capacité du cerveau à se reconfigurer. Ces résultats confirment que la neuroplasticité reste active à tout âge : plus on apprend, plus le cerveau se prépare à apprendre.
Le jonglage : un outil accessible pour la santé mentale et physique
Souvent perçu comme un art réservé aux professionnels du cirque, le jonglage est en réalité une activité accessible, ludique et bénéfique à tout âge. Contrairement aux idées reçues, il ne nécessite ni talent particulier, ni matériel coûteux. Comme le souligne l’étude de l’Université de Poznań, « le potentiel d’apprentissage d’une nouvelle tâche motrice telle que le jonglage reste élevé, même chez les adultes plus âgés ».
Grâce à sa simplicité de mise en œuvre, le jonglage peut être pratiqué dès l’enfance et jusqu’à un âge avancé, avec des effets positifs démontrés sur la santé mentale, la coordination motrice, et les fonctions cognitives. Il représente une activité complète, à la fois stimulante et agréable, idéale pour renforcer les capacités d’attention, réduire le stress, améliorer la mémoire et maintenir la plasticité cérébrale.
Pratiqué seul à la maison, en famille ou lors d’ateliers encadrés – comme ceux proposés par les professionnels Certifiés Brain Ball – le jonglage s’intègre facilement dans la vie quotidienne. De plus en plus utilisé dans les établissements scolaires, centres de soins, maisons de retraite et programmes de rééducation, il séduit par son efficacité, sa facilité d’apprentissage et son caractère intergénérationnel.
Conclusion : une activité simple aux multiples bénéfices
Le jonglage est bien plus qu’un divertissement. C’est une activité accessible à tous, avec des bénéfices scientifiquement prouvés sur le cerveau, quel que soit l’âge ou le niveau de compétence. Grâce à ses effets sur la plasticité cérébrale, il peut jouer un rôle clé dans l’entraînement cognitif, la rééducation motrice, et la prévention du vieillissement cérébral.
Il est temps de redonner au jonglage la place qu’il mérite dans nos routines quotidiennes, nos établissements éducatifs et nos programmes de santé.
En savoir plus
1- Malik J, Stemplewski R, Maciaszek J. The Effect of Juggling as Dual-Task Activity on Human Neuroplasticity: A Systematic Review. International Journal of Environmental Research and Public Health. 2022; 19(12):7102. https://doi.org/10.3390/ijerph19127102
Draganski, B., Gaser, C., Busch, V. et al. Changes in grey matter induced by training. Nature 427, 311–312 (2004). https://doi:10.1038/427311a